Familles et fermes anabaptistes dans le T.-de-B.

Almanach "L'anabaptiste ou le cultivateur par expérience" ; n° 1, 1812

Par LISA
Archive : AD90 5J T3154
Dans l'article Registres anabaptistes, nous avions pressenti que le registre d'état-civil de la Maie, même complété marginalement par celui de Montbéliard, ne mettait en lumière qu'une faible partie des familles anabaptistes du département. Nous avions soulevé un coin du voile en examinant la cote AD90 3E 1066 (baux de la seigneurie de Florimont à Normanvillars).
Le travail réalisé par Robert Baecher en 2003 (Souvenance Anabaptiste n° 22) et 2008 (Sources notariales anabaptistes tome 1, Belfort + SA n°27) permet d'aller beaucoup plus en profondeur sur ce sujet dans les archives belfortaines. Dans ses recherches, M. Baecher a étudié l'ensemble des archives conservées aux AD90 et a prolongé ses investigations aux AD68, où il a mis en évidence des actes importants qui nous auraient assurément échappés.

Cet article remplace donc et augmente considérablement le paragraphe 2-5 du précédent.

Nous commençons par étudier quelques familles anabaptistes, sur lesquelles les documents nous ont fourni des informations intéressantes.
Ensuite nous reconstituons d'une manière assez complète la succession des baux anabaptistes dans les fermages du département (la seigneurie de Rougemont restant en grande partie dans l'ombre, pour les raisons rappelées ci-dessous). 

1. Familles anabaptistes

Nous consacrons deux paragraphes à la famille Klopfenstein, dont la trace dans le département remonte à 1729, puis spécifiquement à Peter fils, dont les archives notariales témoignent d'une forte activité dans le secteur de Bourogne.

Nous éclairerons ensuite quelques autres familles, pour lesquelles les informations permettent d'évoquer plusieurs générations, pour finir avec une page de signatures.

1-1. Famille Klopfenstein

Dans les archives étudiées, la famille Klopfenstein bénéficie d'une importante visibilité :

  • dans le registre de La Maie, où tous les enfants de Peter sont régulièrement enregistrés.
  • dans divers registres notariaux, où apparaissent fréquemment ses enfants, et en particulier Peter (1a-4), fermier seigneurial à Bourogne, qui contracte de nombreux baux, des obligations et acquiert plusieurs terres.

Avec leurs alliés, ils paraissent occuper une place importante dans la vie économique du département de la seconde partie du XVIIIe siècle.
Cette visibilité permet de tracer leur généalogie. Nous nous limitons aux Klopfenstein potentiellement installés avant la Révolution :

La première trace de Peter (en rosâtre sur l'arbre) remonte au 15 mai 1729 (2E5 25). Il vient alors de Belverne (70064) où le prince de Montbéliard avait installé quelques familles anabaptistes : Peter et son épouse Anna Lugenbuehl (1) y sont recensés en 1727 (AD70 E291)  :


(Bedter Klofen stin)

Dans cet acte de 1729, il prend à bail pour 6 ans la vacherie des Chéseaux à Montreux-Jeune appartenant au comte de Reinach. Il résidait déjà à Montreux depuis quelques mois (cité comme témoin en février 1729). Mais il délaissera vite ce bail, car, dès novembre, à la naissance de son fils Hans (sans doute son premier enfant), il est donné comme fermier à Niederwyhl (68290 Bourbach-le-Haut)  :

Den 8 windtermonet 1729 ist zu niderwill
einen ehlichen Sohn geboren, namens Hans
Klofenstein, sein Vatter Petter Klofenstein und
Mutter anna lugen büll.
(registre de La Maie AD90 1Num pap0101-2D 1/1)

 

C'est à Niederwyhl que naîtront au moins 7 enfants du couple. Ces naissances seront toutes inscrites sur le registre de l'assemblée de La Maie, que la famille devait fréquenter assidûment (à 20 km de leur ferme). À la fin des années 1740, Peter quitte Niederwyhl pour la ferme seigneuriale de Rougemont (2).
À la fin des années 1750, son épouse Anna décède. Il se remarie en 1759 avec Maria Wiederkehr qui lui donnera un dernier enfant : Christen.
En 1762, il abandonne le bail de la ferme de Rougemont (2) ; il décédera en 1766 à la ferme de St-Nicolas où son fils aîné Hans est fermier.
On ne trouvera aucun acte notarial le concernant aux AD90, car les archives de la seigneurie de Rougemont n'y sont pas déposées (voir notre article).

Le fils aîné, Hans (1729-?), qui semble demeurer toute sa vie active fermier de la ferme de St-Nicolas à Rougemont, restera pour la même raison quasiment invisible dans nos archives belfortaines. On le voit seulement apparaître 3 fois comme caution pour ses fils Michel et Christen, pour des baux à Belfort, la Milandre et Chavanatte, et une fois comme preneur avec ledit Michel pour des pâturages à Lamadeleine appartenant au duc de Valentinois (héritier des Mazarin). Par contre, lui aussi fréquentera la très proche assemblée de La Maie, dans les registres de laquelle tous ses enfants auront leur naissance inscrite (3).
Son frère Michel (1740-1817) est également très peu apparent dans les archives belfortaines : on le trouve seulement à 2 reprises comme représentant de son beau-frère Hans Müller, qui prend à bail la ferme du Collège royal de Colmar à Chavanatte. Il est probablement resté toute sa vie dans le secteur de Rougemont et n'a pas eu d'enfants.

Il en va tout autrement avec le fils cadet, Peter (1733-1801), comme on le verra au chapitre suivant.

Avant de regarder de plus près le parcours de ce dernier, mentionnons un acte important (AD68 4E47 286), rapporté en détail par R. Baecher (4) : l'inventaire après décès de Peter Klopfenstein père, en 1766.
Y sont mentionnés la veuve Maria Wiederkehr (mère du benjamin Christen), et les 7 enfants survivants du 1er lit : Hans, Johanna, Magdalena, Peter, Maria, Michel et Kathrina ; avec les époux des 4 filles : Christen Müller, Nicklaus Blanck, Jacob Eicher et Christen Rich / Reicher.

1-2. Peter Klopfenstein fils, fermier seigneurial

Registres

Si les fermiers anabaptistes de la seigneurie de Rougemont sont invisibles dans les archives "civiles" conservées à Belfort, mais bien visibles grâce au registre de La Maie, c'est tout le contraire de ceux installés au sud du département.

En effet, les archives des seigneuries de Belfort, Delle, mais surtout Grandvillars, Bourogne, Florimont et Montreux sont riches en actes notariaux ou de justice concernant des anabaptistes qui y sont installés.
À contrario, ce sont les "actes de vie" qui manquent. Quelques mariages figurent dans le registre de l'assemblée de Montbéliard, surtout pour le secteur sud-ouest. Et, de toutes manières, ce registre ne contient pas d'actes de naissance.
On ne s'étonnera pas donc que les dates de naissances des enfants de Peter Klopfenstein et Maria Engel soient inconnues. On a en revanche presque tous leurs mariages (à l'exception de celui de Magdalena avec Nicklaus Blanck).

La première fois que Peter apparaît dans les actes notariaux, c'est déjà comme preneur du bail de la seigneurie de Bourogne le 19 mai 1762, en association avec Nicklaus Engel, certainement son beau-père. Il a alors 29 ans et est marié à Maria Engel depuis 9 ans (il a pu auparavant prendre une tenure dans la seigneurie de Rougemont, qui nous échappe pour la raison ci-dessus). C'est la veuve d'Ulrich Neuhauser, précédent tenancier, très probablement anabaptiste lui aussi, qui leur cède son bail.

(signature de Nicklaus Engel au mariage de sa fille le 30/11/1753)

Ferme seigneuriale


Le château de Bourogne, tel qu'il se présentait encore au début du XXème siècle, aujourd'hui ruiné (plaquette apposée sur le site).

Il importe de préciser que ces preneurs de la ferme seigneuriale de Bourogne n'ont pas à leur disposition seulement des bâtiments agricoles et des terres.
Le bail (renouvellement) pris par la veuve Neuhauser (Ursule Ober) en 1759, qu'elle partageait avec ses fils, comprenait ainsi tous les droits seigneuriaux, fruits et revenus, château, tous les bâtiments, terres, étangs, moulin, dîmes et autres rentes ; la dame de Bourogne ne conservait que la moitié des amendes, dommages et intérêts (AD90 2E3 2).
Celui de 1786, renouvelé pour le couple Klopfenstein, comprenait, en plus des biens fonciers et immobiliers, les animaux de la bergerie, les corvées (réglées le plus souvent en argent), le débit de sel, les portions de dîmes possédées par le seigneur à Bourogne et Thiancourt. Tous les détails sont précisés, comme le fait que les cuisines du petit château seront communs entre les bailleurs et les preneurs (AD90 2E3 9).

Contre une somme importante (2800 livres annuelles en 1759 et 5700 en 1786), le preneur était donc en droit de percevoir et conserver (presque) tous les fruits, revenus et droits appartenant au seigneur, tant par droit féodal que par propriété pure et simple.

En 1769, alors que le premier bail courait encore pendant 5 ans, un conflit se fait jour entre Peter et le nouveau seigneur de Bourogne, Pierre Merlin de St-Didier, ancien militaire et gouverneur de Haguenau, nouveau seigneur de Bourogne (5).

1769 à 1792

Le 13 février 1769, il apparaît ainsi que les fermiers Klopfenstein et Engel (père) sont empêchés par St-Didier de jouir de leur bail. Un accord est trouvé entre les parties pour éviter un procès (AD90 2E1 220). Le fils la Fage, précédent seigneur, verse aux fermiers dépossédés 2400 livres de dédit.
Le 18 août, tout rentre dans l'ordre : Merlin de St-Didier donne en bail pour 15 ans à Peter et sa femme Maria la ferme seigneuriale de Bourogne, hormis le moulin, pour 2400 livres annuelles (2E3 2). On perd là la trace du beau-père Nicklaus Engel. 
Finalement, opération blanche pour les Klopfenstein. Il s'agissait en fait plus d'un conflit entre ancien et nouveau seigneur car c'est St-Didier qui empoche les 2400 livres.

Sur cette période, on trouve un grand nombre d'actes qui montrent que Peter étend ses activités, ou place ses liquidités :
1773 : prise d'un bail des héritiers de Pierre de Saint-Didier.
1774 : Peter est créancier de la succession de Rudolf Conrad, anabaptiste fermier à Montreux.
1777 : obligation par Théodore Devy de Bourogne.
1778 : acquisition par adjudication, puis revente d'une maison à Bourogne.
1779 : idem pour 2 pièces de terre.
1779 : prise du bail du moulin de l'Écrevisse à Normanvillars appartenant au seigneur de Barbault ; son fils Pierre est caution.
1779 : inversement, la même année, c'est Pierre qui prend à bail l'ensemble des biens du même seigneur, moutons et dîme comprise à Florimont, Courcelles, Lepuix-Neuf, Suarce, Chavannatte ; ce bail ne concerne pas les biens à Normanvillars, qui constituaient une part importante, voire majeure des possessions du seigneur de Florimont ; 2700 livres annuelles ; tous les enchérisseurs étaient anabaptistes, sauf un.
1780 : par amitié pour Peter Lugibëull (sans doute apparenté à sa mère), qui avait été enchérisseur du moulin de l'Écrevisse, Peter lui cède le bail, au prix de l'enchère.
1780 : Peter est déjà fermier des dîmes de la seigneurie à Bourogne, mais jusqu'ici il lui manquait celles du chapitre de Besançon ; il les prend aussi à bail.
1780 : bail du produit de 2 étangs et de la moitié des dîmes à Thiancourt et Grandvillars, appartenant à une héritière de St-Didier.
1781 : obligations par Jacques Monnier de Bourogne, puis par Thérèse Gobel.
1781 : prise du bail des terres de St-André appartenant au baron de Ferrette, seigneur des lieux, pour 1500 livres annuelles.
1782 : obligations par François Bony, puis par Théodore Banwarth, puis Jean Pierre Eguelin et enfin par Madeleine Norrot, tous de Bourogne.
1783 : obligation par Louis Galliet, puis achat de deux champs.
1785 : 2 obligations par des habitants de Bourogne, puis achat de deux champs à Jacques Cottet de Bourogne, et d'un 3ème à Jacques Norrot de Bourogne.
1786 : achat d'un champ puis d'une obligation ; les vendeurs toujours de Bourogne. La même année, c'est le renouvellement du bail de la seigneurie, par le nouveau seigneur, François-Meinrad de Barth (ci-dessus).

(signature des preneurs ; exceptionnellement, l'épouse signe, témoignage d'un niveau social assez élevé)
1788 : une obligation.
1789 : achat d'un champ, suivi de la revente de plusieurs parcelles de terres.
1789 : bail mystérieux, car il n'apparaît que dans un répertoire du 2E1, par un certain sieur d'Auchier.
1789 : achat d'une coupe de bois appartenant au seigneur de Barth, pour 2886 livres en louis d'or "comptés sur la table".
1790 : achat d'un champ.
1790 : Peter cède le bail du moulin de Bourogne à Augustin Beuchon de Pont-de-Roide.
1792 : le pouvoir révolutionnaire est en place ; les nobles sont partis, leurs biens sont devenus nationaux. Peter déclare qu'il y a des réparations importantes à faire dans le bâtiment qu'il occupe du sr. Barth, maintenant bien national.

Peter réside à Bourogne jusqu'à son décès en 1801. D'autres recherches permettraient de connaître le ou les nouveaux propriétaires des biens nationaux ex-seigneuriaux de Bourogne, et peut-être d'en savoir un peu plus sur leur ex-fermier.

Son fils aîné Pierre/Peter avait déjà pris un domaine en fermage ; on le retrouvera par la suite à Froideval, à nouveau à Florimont, à Milandre près de Beaucourt... Cela sort du projet  de cet article.

1-3. Autres familles
Thueller :
Famille originaire de Biglen dans le canton de Berne (Suisse).
Un Christian Thueller est tenancier d'une ferme à Normanvillars depuis au moins 1737. Il est probable que le premier preneur soit Christian Thueller père, et qu'à partir de 1745, on ait affaire au fils, marié à Frena Steiner.
En 1784, c'est Ulrich Thueller qui prend la suite de son père. Lui est marié à Madeleine Steiner.
Bösiger :
La présence de cette famille à Normanvillars est aussi régulière que celle de la précédente. Ulrich Bösiger succède en 1737 à Porchy et Poncel (NA) dans une ferme que la famille tiendra jusqu'à la Révolution. Il est marié à Barbe Martin. Son fils Ulrich, marié à Catherine Steiner, lui succède en 1784 ; de là à la Révolution, il semble y avoir aller et retour entre Ulrich et Hans Bösiger son frère.
En 1774, un autre frère, Christen, reprend le bail de la ferme de la Norappe à Rechésy ; il le conservera jusqu'à la Révolution.
En 1778, Urs Bösiger est résident à St-André (Florimont), mais nous ignorons sa parenté avec les précédents.
Stauffer :
Famille originaire de Steffisburg dans le canton de Berne ; plusieurs branches difficiles à relier.
Jean-Jacques Stauffer remplace un nommé Claude Maître (NA) dans une ferme à Normanvillars, également en 1737 ; il vient du secteur de Masevaux. En 1757 c'est son fils Hans qui lui succède. En 1765, un bail pour le même domaine est concédé à Hans, son frère Christen et sa sœur Verena, enfants de Jean-Jacques. De 1776 à la Révolution, Hans et Katrina Lugbühl sa femme seront tenanciers de cette ferme.
On trouve des Christen Stauffer, des Michel Stauffer, ici et là dans le secteur, mais les informations sont trop ponctuelles pour être exploitées.
Gerber :
Famille originaire de Langnau dans le canton de Berne. Dans son article de 2008, R. Baecher détaille le parcours de Hans Gerber, depuis sa convertion à l'anabaptisme à Langnau.
Hans Gerber prend d'abord, en 1716, le bail d'une ferme à Bourogne appartenant à Tourtelier, maître de poste à Delle. On le retrouve ensuite en 1726 à la vacherie de la Grosse Taille de Boron appartenant à Taiclet, avocat à Delle, alors que son fils Gaspard est meunier au moulin de Bourogne.
La même année, il prend à ferme la vacherie voisine de Chalembert où il est associé à Gaspard dans un bail de 1738 ; et, parallèlement, les deux prennent à bail une ferme à Chalembert auparavant tenue par Bouquevald (NA).
Mais des dissensions apparaissent entre Hans et ses enfants (1 fils, Gaspard, et 4 filles), nés de Frena Lüty sa première femme. Une convention est signée entre eux pour éviter procès.

C'est, en 1740, sa fille Catharina Gerber, veuve de Daniel Steiner, et leurs fils Hans et Daniel Steiner, qui reprendront le bail de la vacherie de la Grosse-Taille.
Acte de baptême de Catharina Gerber à Langnau le 17 juillet 1691 (AC Berne, K. Langnau) :
(Hans Gerber anab. auss dem Laup zu Wingey) NB : Dieses Kind wurde mir von dem Grossvater Hans Gerber also angeben : mein Sohn hat im Kind überkommen und ich hab gedacht ich wols euch anzeigen, dass ihrs tauffet, wan ihrs gut findet; ist es aber nit recht, so möget ihrs vor Gott verantworten.
(Hans Gerber anabaptiste des chaumes de Wingey) NB : Cet enfant m'a été ainsi présenté par le grand-père Hans Gerber : "Mon fils m'a remis un enfant, et j'ai pensé vous le montrer pour que vous le baptisiez, si bon vous semble ; mais si ce n'est pas le cas, vous devrez en répondre devant Dieu."
 
Le grand-père était de Langnau, mais Hans et son épouse habitaient Wingey, commune voisine de Trubschaden. Dans cette convention de 1734, Catherine Gerber apparaît être remariée avec Michel Rupp d'Audincourt ; dans une autre, en 1739, elle est à nouveau veuve.
Steiner :
Famille originaire de Signau dans l'Emmental, canton de Berne (Suisse).
Jusqu'en 1727 au moins, le couple Daniel Steiner x Catherine Gerber est installé à Audincourt.
Aux AD25 sont conservés un certain nombre de recensements de la principauté de Montbéliard ; dans les listes concernant Audincourt, on trouve cette famille ; est aussi mentionnée la mère de Daniel : Élisabeth Franchouser (Franckauser].
Ils ont en fait au moins 2 fils en plus de Hans et Daniel : Johann Urban donc, et Pierre Abraham. La naissance à Audincourt de chacun, hormis celle de Hans, est attestée par les archives paroissiales de Signau (celles d'Audincourt ne sont pas consultables en ligne).
Voici les extraits des baptêmes en 1731, 1724, 1726 (AC Berne, K. Signau) :

1726 den 25st september wordet zu Audincourt ... Grafschafft Montbelliard getaufft ein eheliges [Sohn] Daniel. Daniel Steiner von Lignau / Catei Gerber von Langnau
Daniel et son frère Hans, puis Hans seul, sont fermiers à la Grosse Taille, ferme appartenant à la communauté de Boron. En 1779, le bail est renouvelé à son nom et à celui de son fils Daniel.
Les mêmes Daniel et Hans Steiner avaient pris à bail, en 1753, la ferme à Normanvillars, appartenant aussi à la famille Barbault, occupée auparavant par Jean-Henry Porchy ; par la suite, c'est Daniel seul qui la tiendra, puis sa veuve Élisabeth Kaufmann et leurs enfants ; la période se termine alors que Christen Steiner, l'un des fils, l'a en bail pour 18 ans, depuis 1790.
1-4. Signatures

Chaque lien renvoie vers un fermage que l'intéressé a eu en bail.

Amstutz
Berner
Bösiger

Ulrich (Ullei böβeiger)
Bürcki
Christener
Frutiger

Conrad (Chunradh frudger)
Gerber

Hans (ych hans gährbehr)
Hummel
Joder
Klopfenstein
Lugbühl

Christen (lugibüll)

Hans (Lugbüll)

Peter (Petter)
Neuhauser
Rubi
Schallenberg

Christen (schallenberger)
Stauffer

Christen (Stoüffer)
Steiner
Stucki
Zürcher

Stefan (Stäffen)

Il apparaît nettement que, quand ils en ont la capacité, les fermiers anabaptistes signent en allemand. Parfois, les actes mentionnent que leur contenu a été "adapté en langue allemande". Jusqu'à la Révolution, ces populations sont presque exclusivement germanophones. Au delà, la volonté d'intégration de la république les conduira à adopter progressivement la langue du pays dont la nationalité leur aura été accordée.

2. Fermages anabaptistes du T.-de-B.
M. Baecher a relevé de nombreux actes concernant des anabaptistes, désignés comme tels ou "certains, probables ou hypothétiques". Pour un fermage donné, les baux portant sur des non-anabaptistes n'ont en général pas été relevés, ce qui pourra former des lacunes dans la succession des tenanciers que nous avons essayé de reconstituer.
Par ailleurs, les fermes n'étant pas toujours désignées d'une manière précise, des erreurs d'interprétation peuvent se produire marginalement.
Nous nous limitons aux baux de fermes (bâtiments + terres) de lieux situés dans le T. de B. actuel.
Conventions : B : bail ; SB : sous-bail ; CB : cession de bail ; Q : quitte le (ou renonce au) bail ; (rien) : simple citation ; || : changement de tenancier ; NA : non anabaptiste.
Les fermes sont classées par propriétaires, puis par communes.
Les plans individuels des fermes sont tous issus des plans cadastraux napoléoniens de Boron (3P 36), Florimont (3P 68), Grandvillars (3P 75) et Réchésy (3P 103). Les signatures proviennent toutes des séries AD90 2E1, 2E4, 2E5 et 3E des actes notariaux cités.
2-1. Seigneuries de Florimont, de Grandvillars et autres propriétés à Boron
Ces territoires forment un ensemble dense de grandes propriétés qui se trouvèrent affermés de plus en plus systématiquement à des agriculteurs anabaptistes dans la seconde moitié du XVIIIe siècle. Elles relèvent de divers propriétaires, parmi lesquels la famille de Barbault se place en tête dans cette pratique (voir carte et  conclusion).
Famille de Barbault, seigneurs de Florimont
Normanvillars
Les "domaines seigneuriaux" à Normanvillars sont nombreux (souvent assis sur des "cantons") ; à part l'Écrevisse et la Maison Rouge, les fermes ne portaient pas de noms. Il est rarement possible de les identifier aux fermes actuelles. À défaut, nous utilisons le nom du premier occupant cité.
  • moulin de l'Écrevisse

    B 1710 (emphytéote) Nicolas Werther (NA)  ||  B 1757 (17 ans, par François Werther, fils de feu Nicolas) Jean-François, François et Jacques Reset (NA) [il peut s'agir d'un autre moulin]  ||  B 1760 Friedrich Baumgartner ; 1762 id.  ||  1777 Pierre Lugbiehl (meunier)  ||  1779 (9 ans aux enchères) Pierre Klopfenstein de Bourogne  ||  CB 1780 Peter Lugbiehl (ancien meunier) ; 1785 (bail d'étangs) id. ; 1786 id. ; B 1788 id.
  • ferme "Thueller"
    B 1737 Christian Thueller  ||  B 1745 (9 ans) Christian Thueller fils  ||  B 1756 (9 ans) id. ; B 1764 (9 ans) id. ; B 1772 (9 ans) id.  ||  B 1784 (9 ans) Ulrich Thueller fils du précédent ; 1792 (impositions)
  • ferme "Poncelle et Porchy"
    Jean Baptiste Poncel (NA) et Philibert Porchy (NA)  ||  B 1737 Ulrich Bösiger ; B 1745 (9 ans) id. ; B 1753 (12 ans) id. ; B 1760 (15 ans) id. ; 1763 id. (acquisition des dîmes de Normanvillars) ; B 1773 (15 ans) id. ; B 1784 (15 ans) id.; 1785 Ulrich Bösiger le jeune (étangs)  ||  B v. 1787 Hans Bösiger  ||  B 1790 (→1803) Ulrich Bösiger fils, frère de Hans ; 1792 (impositions)
  • ferme "Claude Maître"
    Claude Maître (NA)  ||  B 1737 Jean-Jacques Stauffer  ||  B 1745 (12 ans) id.  ||  B 1757 Hans, fils de feu Jean-Jacques puis B 1765 Hans, Christian et Verena Stauffer, enfants de feu Jean-Jacques  ||  B 1776 (9 ans) ledit Hans Stauffer ; B 1785 (12 ans) id. ; 1792 (impositions)
  • ferme "Bouquevald"
    vve. Bouquevald  (NA) ||  B 1737 Hans et Gaspard Gerber
  • ferme "Pierre Jacquemin"
    B 1739 Stephan Zürcher (ensuite avec Jacques Kaufmann)  ||  B 1747 Jean Hildy Q 1750  ||  B 1750 (9 ans) Christen Augsburger père et fils  ||  B 1752 Hans Wenger  ||  B 1758 (15 ans) Christen Augsburger et Jacques Kaufmann (de la Maison Rouge)  ||  B 1772 (9 ans) Christ Stutz ; B 1781 (9 ans) id.  ||  CB 1782 Hans Zürcher, beau-frère de feu Christ Stutz (cession par Hans Steiner de la vacherie de Boron au nom d'Élisabeth Zürcher la vve.)  ||  B 1790 (9 ans) Jean-Ulrich Amstutz ; 1792 (impositions)
  • ferme "Pierre Philibert"
    Hans Wenger ; B 1759 (28 ans) id. ; B 1784 (9ans) id. ou homonyme ; 1792 (impositions)
  • ferme "Petitjean du Plaisy"
    B 1740 (9 ans) Hans Bend  ||  B 1750 (7 ans) Verena Bachmann, vve. de Jean Müller (Hans Bend caution)  ||  B 1757 id.
  • ferme "Étienne Guenin"
    B 1740 (9 ans) Jacob Kaufmann
  • ferme "Friedrich"
    B 1749 (9 ans) Friedrich Baumgartner ; B 1755 (3 ans) id. ; B 1759 (18 ans) id.  ||  Hans Steiner, fils de Hans, fermier à Boron ; B 1779 (9 ans, aux enchères) id. ; B 1788 (15 ans) id. (ou homonyme) ; 1792 (impositions)
  • ferme "la Maison Rouge"

    Verena Bachmann, vve. de Jean Müller ||  1758 Christ Augsburger et Jacques Kaufmann dmt. au Montingaut (Levoncourt)
  • ferme "Porchy"
    Jean-Henry Porchy  ||  SB 1753→1757 Daniel et Hans Steiner, frères (de la vacherie de Boron)  ||  B 1757 Daniel Steiner seul ; B 1772 (9 ans) id.  ||  B 1781 (18 ans) Élisabeth Kaufmann, vve. de Daniel Steiner et ses enfants, dont Christen Steiner  ||  B 1790 (18 ans) Christen Steiner ; 1792 (impositions)
  • ferme
    B 1763 (12 ans) Peter Wenger ; B 1774 (9 ans) id.  ||  B 1781 (18 ans) Hans Moser et Madeleine Wenger, héritière du précédent  ||  CB 1784 Peter Lugbiehl (du moulin de l'Écrevisse) ; B 1785 (9 ans) id. ; 1792 (impositions)
  • ferme "de la Tonnelière"
    B 1752 et 1754 François Werther ; Q 1756 (sa vve. Catherine Donzé)  ||  CB 1756 Christen Lugbiehl et Friedrich Baumgartner  ||  B 1773 (9 ans) Christen Lugbiehl et Jean-Pierre Kircher (NA) ; 1776 Christen Lugbiehl ; B 1781 id. ; B 1788 id. ; 1792 (impositions)
  • ferme "Roty"
    Jean Roty  ||  B 1773 (9 ans) Ulrich Bösiger  ||  B 1782 Hans Bösiger
  • le "château Salomon", meublé

    B 04.1790 (3 ans) Peter Lugbiehl fils
    B 11.1790 (3 ans, une autre partie) Charles Berner
Seigneurs de Grandvillars (de la Basinière et héritiers)
Chalembert (Grandvillars et Boron)
Sur le plan napoléonien figurent encore pour ce secteur une ferme non nommée, la ferme Belrichard, sur Grandvillars, et une autre, sur Boron (la vacherie ?)
  • la Vacherie
    B 1726 (12 ans) Hans Gerber  ||  B 1738 (cité en 1756) id. avec Gaspard Gerber son fils  ||  B 1756 (9 ans) Hans Schallenberg ; B 1765 (12 ans) id.  ||  B 1775 Christen et Jacob Schallenberg ; B 1792 (15 ans) id.
  • ferme "Girardy"
    Nicolas Girardy  ||  B 1742 (12 ans) Ulrich Schallenberg (de Boron) et Hans Schallenberg (de la vacherie), frères  ||  B 1756 (9 ans) Jean-Claude Eloy (NA) et Henry Porchy (NA) ||  B 1760 Jost Joder fils  ||  CB 1762 Peter Liechty
  • la Chaifferie (bergerie), qui correspond à la ferme "dite Chalembert" sur le plan napoléonien

    1760 Gaspard Linder et Christen Schlegel  ||  B 1780 (16 ans) Niclaus Schlegel  ||  B 1786 (16 ans) Christian Stauffer 
  • ferme
    B 1749 (9 ans) Christ Lugbiehl 1751  ||  B 1762 Pierre Liechty (est-ce le même domaine ?) ; B 1772 id. ; B 1783(18 ans) id.
Grandvillars
  • ferme seigneuriale
    1756 Hans Lugbiehl  ||  B 1767 (9 ans) Christen Stucki ; B 1773 (9 ans) id. avec Christen Hummel son gendre ; B 1777 (9 ans) id.  ||  B 1784 (9 ans) Christen Hummel et Benedict Stuky son beau-frère ; 1785 le tiers du bail cédé audit Benedict Stuky (pour le logement duquel un bâtiment sera édifié)  ||  CB 1790 Jost Joder
  • moulin
    B 1792 (9 ans) Benedict Stucki
Taiclet, avocat à Delle puis Madamé, conseiller au Conseil Supérieur d'Alsace
Boron
  • ferme et vacherie de la Grosse Taille (dite aussi ferme Madamé)

    B 1726 Hans Gerber ; 1734 id. ; 1739 id.  ||  B 1740 (18 ans) Catherine Gerber, fille de Hans et veuve de Daniel Steiner et leurs fils Hans et Daniel Steiner  ||  B 1758 (9 ans) Hans Steiner  ||  B 1779 (18 ans) Hans Steiner et son fils Daniel Steiner
communauté de Boron
Boron
  • ferme "Beuchat" (ou "les Grabeusets")

    Pierre Schwalme  ||  B 1740 (28 ans) Ulrich Schallenberg  ||  B 1765 (18 ans) Christen Eicher  ||  B 1784 (18 ans) Jacob Ernst
  • ferme du Laumont

    B 1784 (18 ans) Hans Bösiger

On relève sur cette carte (extrait de AD90 1Fi 246), à Normanvillars, l'Écrevisse, la Maison-Rouge et le Temple des Anabaptistes, voisinant avec leur cimetière ; à Boron, la Basse-Taille = la Grosse-Taille (ainsi que l'étang Madamé), la ferme Beuchat, la ferme du Laumont, la Vacherie ; à Grandvillars et Boron, les fermes de Chalambert.

 
2-2. Seigneurie de Montreux-Foussemagne et propriétés de la famille de Reinach
La famille de Reinach a, la première, affermé certains de ses biens à des anabaptistes. Ses possessions, qu'ils s'agissent de biens seigneuriaux ou de biens en simple propriété (comme la ferme de la Maie) sont dispersés à l'est du département, et souvent difficiles à localiser (hormis justement la Maie).
Famille de Reinach, seigneurs de Montreux-Foussemagne
Montreux
  • domaine seigneurial
    B 1713 (3 ans) Jean-Jacques "Strucrely" (A?)
  • l'huilerie
    B 1727 (3 ans) Jacob Sanner   ||  B 1759 (9 ans) Jean Alliman  ||  1785 (iad de feu Jean Alliman le vieux), son fils Christ Alliman nouveau fermier
  • les Chéseaux (Montreux-Jeune), la vacherie
    B 1729 (6 ans) Peter Klopfenstein (cf. 1-1||  ...  ||  B 1780 Christ Hummel et Hans Naftziger Q 1781
Magny, Chavannes-les-Grands etc.
  • ferme
    B 1748 (9 ans) Frena Gerber, vve. d'Ulrich Lugbiehl  ||  B 1759 (12 ans) id. avec David Lugbiehl son fils  ||  B ?1790 David et Christ Lugbiehl  ||  B ?1808 David Lugbiehl (Christ décédé)
Foussemagne
  • la Vacherie
    1713 Hans Neuhousen
  • moulin de la Ribe
    B 1729 (6 ans + 1), Christ Lugenbühl
Vellescot
  • la Grande Goutte
    B 1740 (6 ans) Peter Steiner et Daniel Rufenacht  ||  B 1758 (18 ans) Jost Joder, père et fils
Roppe
  • la Vacherie
    B 1727 (3 ans) Jost et Hans Blanck, frères  ||  B 1731 Ulrich Schmucker et Hans Hilty
Cunelières
  • la métairie
    1727 Hans Blanck  ||  B 1731 Ulrich Glucky
Fontaine
  • les Chézeaux (non localisé)
    B 1739 (9 ans) Nicolas Burcki ; 1741 id.  ||  1759 Christ Joder ; 1766 (+ 1/4 de la dîme de Fontaine) ; 1768 id.
Chaux (ou identique au précédent ?)
  • les Chézeaux (non localisé)
    1785 Andreas Rupp
Bretagne
  • la Vacherie
    1759 Christen Schlegel  ||  B 1760 (9 ans) Christ Stauffer
la Maie, Menoncourt (sans doute plusieurs fermages : seigneurie de Rougemont, archives difficiles d'accès)
  • la Vacherie
    1725 Jost Blanck
  • ferme
    B 1759 (9 ans) Benedict Joder  ||  1788 Christ Ernst, Hans Naftziger ; Christ Ernst se dit fermier de la Maie "depuis 30 ans" (affaire judiciaire)
2-3. Autres fermages anabaptistes
Seigneurs de Bourogne, héritiers des sr. de Brünighoffen
Bourogne
  • le moulin
    1726 Gaspard Gerber, fils de Hans
  • ferme seigneuriale
    Ursule Ober vve. d'Ulrich Neuhausen ; B 1759 id. avec Simon Neuhausen son fils  ||  B 1762 (9 ans) Peter Klopfenstein et Nicklaus Engel son beau-père ; 1769 (conflit avec le nouveau seigneur  ||  B 1769 (15 ans) Peter Klopfenstein seul ; 1780 (+ dîmes de l'église métropolitaine de Besançon à Bourogne) ; B 1786 (12 ans) id. (avec augmentations cf. 1-1) ; 1790 id. (cession du bail du moulin)
Seigneurs de Thiancourt (de la Basinière et héritiers)
Thiancourt
  • ferme seigneuriale
    B 1769 (9 ans) Christen Stauffer ; B 1778 (9 ans) id. ; 1780 id.
Famille de Ferrette, seigneurs de St-André
St-André
  • 3 maisons
    B 1759 Hans et Hans Heinrich Stutz ; B 1765 (3 ans) id.
  • ensemble du domaine (?)
    B 1781 (18 ans) Peter Klopfenstein fils
Rechésy
  • ferme de la Norappe

    B 1763 Hans Schallenberg  ||  B 1770 (15 ans) Conrad Frutiger  ||  CB 1774 Christen Bösiger (frère d'Ulrich) ; B 1780 (20 ans) id.
de Barbault seigneur de Florimont (1772) puis Philippe-Henri-Antoine-Xavier-Jacques-Béat-Joseph de Ferrette, seigneur de St-André
Florimont / Courcelles
  • ferme du Fahy

    B 1772 (9 ans) Hans Schallenberg père et fils, de Chalembert, et Christ Hummel, neveu  || 
    B 1786 (18 ans) Christ Bösiger, fils de Jean-Ulrich, de St-André
Seigneurs de Morvillars (de Cointet de Filain et héritiers)
Morvillars
  • ferme seigneuriale
    B 1745→1754 Ulrich Neuhausen, puis Ursule Ober sa veuve
M. de Staal de Cravanche
Montreux-Jeune
  • tuilerie aux Chéseaux
    1760 Christ Christener ; 1761 id ; 1763 avec Hans Christener son père ; 1774 id. (iad)
  • ferme
    B 1760 (20 ans) Ulrich Schmoucker  ||  CB 1762 (de la moitié du bien) Peter Wenger Q 1763  ||  1771 Simon Lehmann et Rudolf Conrad ; 1771 id. (décès de Rudolf Conrad le 20/02/1771, iad en 1774) ; 1772 (bail pour des étangs) Simon Lehmann et Véronique Linder, vve. de Rudolf Conrad
François-Bernardin Noblat, seigneur de Sévenans
Sévenans
  • ferme
    B 1777 (9 ans) Christian Hummel puis CB la même année Joseph Gerig  ||  B 1786 (9 ans) Joseph Gerig pour son gendre Christen Roth
Méziré
  • la Vacherie
    1780 Hans Joder
Collège royal de Colmar
Chavanatte
  • ferme
    B 1771 Michel Klopfenstein [frère de Peter]
Simon Debillaud (Colmar) puis Jean-Claude Guiot
Brebotte
  • ferme
    B 1735 Peter Hänny  ||  ? Christ Lugenbühl  ||  B 1746 (9 ans) Hans Linder  ||  B 1751 (14 ans) id. ; 1757 (ajout d'un autre bien) id.  ||  B 1765 (18 ans) Jean-Ulrich Schott (x Catherine Linder)
Jean-Pierre Brassigny, de Belfort
Belfort
  • ferme
    Henry Kouzer  ||  B 1779 Michel Gerig (qui décède le 04/12/1780 criblé de dettes)  ||  n. d. Andreas Rupp (dans convention du 14/01/1785)  ||  B 1783 (12 ans) Michel Klopfenstein, fils de Hans (de St-Nicolas).

Le Fay (Fahy) et St-André à Florimont (extrait de AD90 1Fi 246).
2-4. Fermages ponctuels
Bourogne, domaine ; à Tourtelier, maître de poste à Delle
B 1718 (ren. pour 6 ans) Hans Gerber
Anjoutey, métairie de la Charme ; à Anne Louise de Ferrette, dame de Roppe
Nicolas Bürcki  ||  B 1733 Jacob Blanck 
Angeot, ferme du Château ; à Melchior de la Motte
B 1731 Hans Ruby  ||  B 1739 Jost Blanck
Autrage, le moulin ; à Lacroix, bourgeois de Belfort
B 1761 Tours Condeflingue (?)
Brebotte moulin ; à Joseph Goffinet de Boron (propriétaire ou amodiataire ?)
Hans Schad ; B 1780 id.
Belfort domaine sur le chemin de Valdoie ; à dlle Marie-Louise Duchossier, vve. Schueler
Sébastien Lindenberg (NA)  ||  CB 1783 David Stoll (d'Allenjoie) par la vve. Lindenberg ; B 1788 id.
Belfort domaine sous le Mont ; à Jean-Christophe Clavey, bailli de Brunstatt
B 1786 (12 ans) Isaac Conrad, fils de feu Rudolphe
Bavilliers tuilerie ; à Nicolas Klein meunier de Bavilliers (propriétaire ou amodiataire ?)
B 1783 Nicolas Schlegel ; 1783 conflit avec Klein ; 1784 Q


La May (la Maie) à Menoncourt et la Charme à Anjoutey (extrait de AD90 1Fi 246).

3. Conclusion

Les archives paroissiales, sources principales de la généalogie, occultent presque totalement, dans notre région, cette population ne pratiquant pas la religion officielle du royaume de France. Des décrets royaux avaient même pour but de l'en exclure.

Il apparaît pourtant clairement qu'un certain nombre de propriétaires terriens, nobles ou bourgeois, et non des moindres, ont contourné la loi, sans être le moins du monde inquiétés (6).
Au premier rang d'entre eux, les Barbault, seigneurs de Florimont, d'origine luthérienne, demeurant auprès du prince de Montbéliard.
À la Révolution, 100% des fermiers de Normanvillars étaient anabaptistes, comme le prouve le compte relevé par Joachim (7). Les fermiers non anabaptistes, les Porchy, Poncelle, Jacquemin etc. avaient cédé la place.

D'autres possédants ont pratiqué la même politique : les seigneurs de Bourogne, Grandvillars, Thiancourt  ont affermé à des anabaptistes l'ensemble de leur seigneurie, pendant la 2nde moitié du XVIIIe siècle ; plus, pour les Grandvillars, les fermes, vacherie et chefferie de Chalembert.
D'autres encore firent de même, d'une manière peut-être un peu moins systématique : les Reinach, qui furent les initiateurs de cette pratique (1713), les Ferrette, seigneurs de St-André, et les seigneurs de Morvillars.
Les bourgeois ou fraîchement anoblis leur emboîtèrent le pas : Debillaud, Madamé (qui a laissé son nom à un étang à Boron), de Staal, Noblat, Brassigny etc.
On voit que la communauté de Boron, influencée par ses voisins de Florimont et Grandvillars, loue ses fermes (Beuchat et Laumont) aux familles anabaptistes du voisinage.
Et jusqu'au collège royal de Colmar, qui recrute Michel, le frère de Peter Klopfenstein. En décembre 1791 (fermage non listé ci-dessus, n'étant pas dans le T.-de-B), en pleine Révolution, le même collège confie à Christen Wenger, anabaptiste, l'exploitation de l'ensemble des biens de l'abbaye de Valdieu, et le soin de "blanchir et entretenir les gros linges de l'église abbatiale, ... fournir les vins et les cierges pour la célébration des messes qui s'y diront" et "abandonne aux preneurs toutes les offrandes qui se feront en ladite église de Valdieu" (cité par R. Baecher).
Mais à cette date, même si les institutions catholiques et royales avaient encore quelques mois devant eux, leur poids et leurs valeurs étaient déjà bien érodées.

Cette communauté, qui prospérait dans la seconde moitié du XVIIIe siècle dans les interstices de la société de l'ancien régime finissant, parait donc assez nombreuse.
N'oublions pas que, ci-dessus, sont répertoriés seulement les familles ayant pris à bail une ferme. M. Baecher en cite d'avantage, nous vous renvoyons à ses publications et à notre dépouillement (source : Autres archives anciennes > R. Baecher, sources not. anabaptistes) .
Et on peut même ajouter potentiellement à cet effectif les familles ou personnes n'ayant conclu aucun contrat, les employés, serviteurs et servantes, journaliers, qui n'apparaissent dans aucun document public, et qui étaient sans doute en partie de la même religion.

Enfin, un article de la Revue d'Alsace de 1914 (8) est intéressant à signaler : en 1779, le curé de Suarce écrivait ceci, à propos d'une ferme de Normanvillars :

(...)

Ce texte est probablement significatif du ressenti, et des ressentiments, des non-anabaptistes vis-à-vis de cette communauté, avant la Révolution.

Plusieurs études ont été entreprises sur cette population.
Ajoutons simplement qu'après (voire un peu avant) la Révolution, beaucoup d'anabaptistes quittent le secteur (voir l'article précédent), pour des contrées parfois lointaines.
D'autres, au contraire, s'y implanteront pour longtemps. Certains y acquerront même une belle notoriété.

Nous pourrons éventuellement compléter ces 2 articles par quelques chapitres consacrés à des aspects originaux découverts au détour de ces documents.
Suite au prochain épisode.


Notes
1. Ce patronyme connait un nombre de variantes absolument considérable, autant dans la rédaction des actes que dans les signatures des porteurs.
2. D'après un acte de 1778 (AD68 4E 17 286), cité par R. Baecher, 
3. Son 4ème fils Jacob / Jacques, établi à Belfort, aura une carrière d'agriculteur renommé et d'homme public. Il est en particulier l'éditeur de l'almanach "L'anabaptiste ou le cultivateur par expérience", dont la couverture du 1er numéro illustre l'entête de cet article.
4. in Souvenance Anabaptiste n°22 (2003) p. 72.
5. La succession des seigneurs de Bourogne est complexe :
Après la mort du dernier Brünigkhoffen (Otto) vers 1750, la seigneurie fut léguée à Antoinette Maximilienne de Barille, épouse de François Nicolas de Serpes de la Fage ; sa mère, Marie Élisabeth de Neueunstein, étant la cousine d'Otto.
En 1767, le fils d'Antoinette Maximilienne, Charles de la Fage, vendit les droits seigneuriaux à Pierre Merlin de Saint-Didier, ancien lieutenant-colonel et gouverneur de Haguenau.
Vers 1786, la seigneurie fut regroupée sous la férule de François Meinrad Joseph de Barth, militaire puis grand bailli de Haguenau, gendre du précédent, qui sera le dernier seigneur de Bourogne.
6. On remarque cependant que la famille de Mazarin ne suit pas cette pratique, hormis pour quelques baux agricoles (pâturages).
7. Collection Jules Joachim, 6J note 5/5.
8. Mémoires d'un curé de campagne à la fin du XVIIIe siècle : C.-E. Gérard, ancien curé de Suarce, mémoire présenté à la cour en 1779, in (Revue d'Alsace, 1914, p. 295 et 296) (AD90 P11).