Quelques actes de l'état-civil d'Anjoutey nous renvoient à une triste réalité de l'ancien droit français : la "mort civile".
Dans un mariage de 1824, Françoise P., mère du marié est
dite "morte civilement" :
Wikipedia nous dit à ce propos que cette procédure (qui a concerné dés l'origine les religieux et les lépreux) était appliquée jusqu'au milieu du 19ème siècle :
- aux condamnés à mort par contumace ou en instance d’exécution,
- aux condamnés aux travaux forcés à perpétuité,
- aux déportés.
Les personnes ainsi condamnées étaient réputées mortes au regard du droit.
L’individu frappé de mort civile était considéré comme ayant perdu sa personnalité juridique. Sa succession était immédiatement ouverte, ses biens lui étaient enlevés pour être aussitôt attribués à ses enfants. De plus son éventuel testament antérieur, quoique établi du temps de sa capacité juridique, était annulé, de sorte que c’était toujours une succession ab intestat qui s’ouvrait. Le condamné étant réputé mort, son mariage était dissous. Son conjoint, devenu libre pouvait se remarier avec une autre personne. Si le conjoint continuait à vivre avec le mort civil, il y avait concubinage et non plus mariage et les enfants qui pouvaient naître à l'avenir étaient illégitimes.
Le mort civil perdait ses droits politiques et civiques. Il ne pouvait plus être ni électeur, ni candidat, ni fonctionnaire, ni juré, ni expert, ni témoin.
Le mort civil perdait aussi certains droits civils: le droit de se marier, le droit d’agir en justice, le droit de reconnaître ses enfants naturels, la puissance paternelle, le droit d’être tuteur, le droit de faire ou de recevoir des libéralités, le droit de recueillir une succession.
Le mort civil conservait cependant le droit de passer des contrats à titre onéreux, ce qui permettait de gagner de l’argent en travaillant, d’acheter, de vendre, de devenir créancier ou débiteur. Seulement, lorsqu’il était partie à un procès, il ne pouvait plaider que par l’intermédiaire d’un curateur spécial qui lui était nommé par le tribunal et quand il mourait de mort naturelle, les biens qu’il avait pu acquérir depuis sa mort civile revenaient à l’État par droit de déshérence.
Le principe de la mort civile était critiqué. On lui reprochait surtout de léser des innocents (la femme et les enfants du coupable), et, en ouvrant immédiatement sa succession, de faire profiter sa famille d’un crime. De plus, en s’emparant des biens que le condamné laissait à son décès, l’État pratiquait une véritable spoliation des héritiers. ...
A Anjoutey, on trouve deux femmes frappées de cette peine infâmante, et heureusement peu fréquente.
Le cas (ci-dessus) de Françoise P. est un peu précisé
au mariage d'un autre de ses fils :
A son décès, son ("ex-") mari est dit "veuf civilement"
:
On trouve également le cas de Généreuse D., dans un mariage
de 1837 :
Heureusement, en France, la loi du 8 juin 1850 ne la supprima que pour les condamnés politiques à la déportation. La loi du 31 mai 1854 l’abolit définitivement (Wikipedia).