La notion de fief est à
la base même de la structure féodale.
Le fief est un ensemble (non partageable) de biens de nature
foncière (tenure), immobilière ou fiscale qu'un
bénéficiaire (vassal) reçoit de son suzerain.
A l'origine, ce bénéfice avait pour but de permettre au
vassal d'assurer sa subsistance et le paiement de son équipement
militaire. Bien que faisant en principe partie du patrimoine du
suzerain, il est très tôt considéré comme
appartenant au vassal.
Celui-ci peut le transmettre à ses héritiers mâles
directs. Le fief
peut toutefois être confisqué par le suzerain pour des
raisons graves (félonie).
Il ne peut être transmis à un autre héritier ou
être alliéné
par le vassal qu'avec l'autorisation du suzerain.
Après la fin du moyen-âge, un roturier peut
acquérir un fief (sous réserve, en principe, du paiement
d'un droit).
A chaque mutation de vassal, le nouveau titulaire prête serment
à son suzerain (prestation de foi et hommage) et doit fournir
à son seigneur un document écrit appelé "aveu et
dénombrement" qui répertorie en détail le contenu
du fief, en s'appuyant sur les documents plus anciens (investitures,
aveux et dénombrements précédents, prestations de
foi)
Ces déclarations permettent, quand elles nous parviennent,
de reconstituer le contenu et l'histoire de ces fiefs.
Le fief d'Angeot
Le village d'Angeot est situé dans le comté de Belfort,
dont il constitue, avec Larivière, Vauthiermont, Brebotte,
Eschênes et Autrage, une subdivision administrative : la
Prévôté ou Mairie d'Angeot. Cette structure
administrative et judiciaire sera vidée de son contenu par
l'administration royale mais la charge de prévôt
subsistera par le système de vénalité
des charges.
Comme à de nombreux endroits, un certain nombre de
"bénéfices" constituent néanmoins un petit fief,
appelé "fief d'Angeot", ou "fief de la Motte d'Angeot".
Ce fief remonte, comme souvent, à "des temps
immémoriaux" ; il est constitué du château d'Angeot
(la "motte d'Angeot") et dépendances, de la rente du moulin
d'Angeot, de terres, d'étangs
et de droits de pêche à Angeot, et quelques villages
avoisinants.
Etat
alphabétique des portions de fiefs en Alsace ; après 1765
: ADTB 13 Ph 25 (le fief d'Angeot apparaît sous le nom de son dernier titulaire : de Dietrich) |
Il comprend aussi, et curieusement, un droit appelé "droit de toise et de cordage (en allemand clafftergeld)" basé sur les façades de maisons autour des murailles de la ville de Belfort.
La présence de cet élément dans le fief d'Angeot remonte à l'année 1500, où l'un des premiers titulaires connus, Thiébault d'Angeot, est investi de ce droit.
Id.
Les "seigneurs" de la Motte d'Angeot
Parmi les nombreuses familles titulaires successivement du fief, seules deux apparaissent dans les registres paroissiaux.
Jusqu'à la guerre de 30 ans, le fief d'Angeot comme tous ceux du secteur relève des Archiducs d'Autriche.
Les titulaires, dans cette période, ont été les familles de Sultzbach (Soppe), Baldeck, d'Angeot, à nouveau de Sultzbach, de Schaffoy, puis Mägere (ou Maigray).
En 1597, Thiébaud Sengelin, mari de la veuve de Thiébaud Mägere (qui avait acquis le fief en 1582), se trouve investi du fief par l'Archiduc d'Autriche, au détriment des enfants Mägere.
Ces derniers sont néanmoins encore présents à Angeot jusqu'en 1689 (décès de Jean Ulrich, fils ou plus probablement petit-fils de Thiébaud) où ils sont appelés Maigray de la Motte.
Après la guerre de 30 ans, le suzerain est le roi de France (et non le comte de Belfort -famille Mazarin-)
Avant 1700, les titulaires sont les Desgrettes et de Viantes, qui ne résident pas à Angeot.
En 1700, le fief est vendu, avec l'accord du roi, au sr. Jean-François Joseph Pigenot (1661-1723), lieutenant de cavalerie.
De 1685 à 1698, Jean-François Joseph a été prévôt d'Angeot, succèdant à Jean Georges Pingenot (ou Pigenot), probablement son père ; la famille Noblat reprendra ensuite la charge jusqu'en 1770.
Jean-François Joseph réside avec sa famille à Angeot. Il y fait baptiser ses 6 enfants, et est appelé Pigenot de la Motte, et une fois "seigneur de la Motte".
(ADTB, 2 E-dépôt GG1)
Aucun des fils Pigenot n'ayant de descendance masculine légitime, le fief sera ensuite donné à François-Louis Marie, conseiller royal, de 1755 à 1765, puis à Jean Dietrich, stettmeitre honoraire de Strasbourg.
Aucun d'eux ne résidera à Angeot.